Le dépistage préventif du coronavirus chez les travailleurs est-il utile ?

La demande pour un dépistage préventif des travailleurs est compréhensible. En raison d’un certain nombre de facteurs, le dépistage massif sur le lieu de travail n’est pas une pratique évidente aujourd’hui. Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. L’utilisation correcte des tests peut être un complément important dans le traçage des contacts et la localisation rapide des travailleurs infectés.

Il existe actuellement différents types de tests pour le coronavirus. Certains dépistent le virus lui-même, d’autres la présence d’anticorps dans le sang. Pour détecter le SARS-CoV-2, on utilise généralement les célèbres écouvillons pour le nez ou la gorge. Ces tests PCR présentent l’inconvénient de n’avoir qu’une sensibilité d’un peu plus de 70 %. Cela signifie que sur dix personnes infectées, trois sont testées négativement, à tort. Les résultats positifs sont par contre sûrs. 

Les tests qui détectent les antigènes donnent des résultats en quelques minutes, mais n’ont une fiabilité que de 60 %. C’est pourquoi, de facto, ils ne servent qu’à réaliser un premier dépistage. Le résultat doit être confirmé par un second test.

Il existe des tests qui détectent les anticorps, la réponse immunitaire au covid-19. Après deux à trois semaines, les anticorps sont présents en suffisance dans le sang pour être détectés. De tels tests peuvent donc être utilisés pour déterminer si une personne a été en contact avec le virus.

Aucune base scientifique

Ces tests peuvent-ils être utilisés sur le lieu de travail ? « Pas les tests détectant les anticorps, et ce, pour plusieurs raisons », explique le Dr Gretel Schrijvers, directrice générale de Mensura. « Nous ne savons pas (encore) si les anticorps permettent d’être protégé contre une nouvelle infection, et pendant combien de temps. On ne sait pas non plus si l’on peut ne plus être malade, mais être contagieux en cas de seconde infection. En outre, le secret professionnel auquel le médecin du travail est tenu ne lui permet pas de partager les résultats avec l’employeur. »

Et qu’en est-il des tests PCR ? Dr Gretel Schrijvers : « Compte tenu des circonstances actuelles et des connaissances dont nous disposons aujourd’hui, je suis convaincue qu’ils sont utiles, à condition d’être utilisés à bon escient. Plus la probabilité qu’une maladie soit présente dans le groupe test est grande, plus la valeur prédictive du résultat du test est élevée. Il n’est donc pas utile de tester l’ensemble des travailleurs. Il s’agit en outre d’une image instantanée : être négatif aujourd’hui ne signifie pas que vous le serez encore dans quelques jours. Des tests répétés peuvent donc être nécessaires. »

Concrètement, cela signifie que pour la majorité des entreprises, il est judicieux de ne tester que les contacts à haut risque, ce qui peut constituer un complément utile au traçage des contacts réalisé par les autorités (qui permet de lister les contacts privés). 

Lister les contacts à haut risque

L’élément clé est donc de déterminer les contacts à haut risque au sein de chaque entreprise. « C’est la raison pour laquelle Mensura a élaboré une analyse des risques », explique Gretel Schrijvers. « Pour certaines fonctions, et dans certaines circonstances, il est difficile, voire impossible, de respecter les mesures de prévention habituelles. Cette analyse des risques permet aux entreprises d’identifier clairement les personnes exposées à un risque accru. Si un collègue présente des symptômes ou si un travailleur reçoit un appel téléphonique de l’équipe de traçage des contacts, des changements peuvent être mis en place, et un test peut être effectué rapidement. Nous augmentons de cette façon considérablement la capacité de détection. En attendant des tests plus concluants ou un vaccin efficace, il semble que ce soit la manière la plus utile d’effectuer les tests. »

Reconnaissance en tant que maladie professionnelle et situations spécifiques

Les médecins du travail utilisent en outre actuellement des tests de diagnostic dans des situations spécifiques, comme les demandes de reconnaissance en tant que maladie professionnelle, et dans certaines activités maritimes ou offshore.

Le covid-19 a été reconnu comme une maladie professionnelle pour les personnes travaillant dans le secteur des soins de santé ou dans d’autres services hospitaliers, les institutions de soins, les maisons de repos et de soins ainsi que les institutions hébergeant des personnes malades et handicapées où le covid-19 a sévi. Les personnes qui ne travaillent pas dans le secteur de la santé peuvent être éventuellement reconnues via le « système ouvert ». Ces travailleurs doivent être exposés au risque professionnel de la maladie, avoir contracté la maladie et être en mesure de prouver qu’ils ont été contaminés du fait de leur travail.

Un groupe spécifique de travailleurs peut également être testé dans des situations particulières, comme la navigation maritime ou les activités offshore, afin d’exclure une infection asymptomatique. Cela permet d’éviter d’importer le virus dans un groupe isolé dans des environnements où l’assistance médicale n’est pas toujours disponible (par exemple, les plates-formes de forage).