« Un deuxième mois de salaire garanti n'est pas la question essentielle »

Le deuxième mois de salaire ne sera pas garanti en cas de maladie. La concertation sociale sur ce sujet n'a pas abouti. Et ce, alors qu'il est urgent de développer une vision à long terme sur la contribution de tous les acteurs à l'intérêt général, estime Roland Vanden Eede, Directeur général de Mensura SEPP.

Le projet concernant le deuxième mois de salaire garanti n'est pas passé. S'il s'agit d'une bonne ou d'une mauvaise chose ? Tout dépend du regard que l'on porte sur la question. Théoriquement, la mesure devrait encourager au maximum les employeurs à miser sur les mesures en faveur de la santé. Mais l'exemple des Pays-Bas – où un collaborateur reste deux ans sur le payroll de l'entreprise – illustre le fait que des effets secondaires imprévus peuvent se produire. Le fait que les personnes sont obligées de s'installer à leur compte, le travail intérimaire ou une attitude récalcitrante par rapport à l'embauche sont monnaie courante.

La carotte et le bâton

En suivant de près le marché de l'emploi, on ne peut s'empêcher de remarquer que l'assurance-maladie et le régime des pensions s'avèrent de plus en plus explicitement être des vases communicants. On constate objectivement que le nombre de travailleurs qui cherchent une issue pour ne plus devoir collaborateur  à un âge avancé est en augmentation. Il s'agit là d'un signe qui montre que certains types de travail ne sont pas combinables avec l'âge. Parallèlement, chacun sait qu'augmenter le taux d’emploi est une nécessité socio-économique.

Au sein de ce champ de tensions, les partenaires sociaux affichent souvent des positions diamétralement opposées. Ce ne devrait pourtant pas être le cas. Pour sortir de l'impasse, il est nécessaire que toutes les parties adoptent une approche similaire : celle du bâton et de la carotte. Les collaborateurs cherchent la sécurité d'emploi ; parallèlement, le fait de ne pas travailler doit être sensiblement moins intéressant. Les employeurs souhaitent réduire les taux d'absentéisme et de rotation, et les coûts qu'ils entraînent, mais ils doivent alors pouvoir offrir un travail adapté et attrayant.

Vision à long terme

Par ailleurs, il est capital d'adopter une vision commune si l'on veut pouvoir relever les défis sociaux de demain. Il n'y aura pas de résultats rapides : nous devons tendre ensemble vers le long terme.

À l'heure actuelle, les structures existantes sont principalement basées sur l'intérêt de chacun. Les syndicats reçoivent après tout une compensation pour le paiement des allocations de chômage. Les mutuelles reçoivent une subvention administrative pour verser des frais de maladie. Les organisations d’employeurs défendent, elles aussi, l'intérêt de leur arrière-ban, qui est très divers. Un lobby fragmenté, dont le but n’est jamais l'intérêt général. Chacun œuvre pour lui-même. Les collaborateurs, enfin, doivent comprendre que le système de sécurité sociale n'est pas tenable.

Une répartition équitable des avantages et des inconvénients

Un deuxième mois de congé de maladie serait une mesure potentiellement bonne. Mais uniquement à condition qu'il soit contrebalancé par une réduction des charges sociales. Dans les cas contraire, il s'agirait d'une augmentation fiscale cachée. Maintenir plus longtemps des collaborateurs en activité ou encadrer le retour au travail de collaborateurs ayant souffert d'une maladie de longue durée ne pourront se faire avec succès que si le travail est faisable, conforte les personnes dans leur valeur ajoutée, offre une chance de développement personnel, etc.

En tant que gardien de l'intérêt général, les pouvoirs publics ont un rôle important à jouer. Ils doivent veiller sur l'ensemble des bâtons et des carottes. Autrement dit : veiller à une répartition équitable des avantages et des inconvénients. Cela ne doit pas nécessairement se faire du jour au lendemain. Le long terme doit, comme on dit, servir de boussole.